Le Mariage de Figaro

Publié le par Olivia

Dès sa première représentation, Le Mariage de Figaro remporte un succès de scandale : son auteur, Beaumarchais, admirateur de Diderot et de Voltaire, y déploie une violente satire politique et sociale qui culmine dans ce monologue.


Dans Le Barbier de Séville, créé en 1775, le barbier Figaro aide le comte Almaviva à enlever Rosine pour l’épouser, alors qu’elle est retenue par le vieux Bartholo. Dans Le Mariage de Figaro, créé en 1784, le comte Almaviva délaisse son épouse Rosine pour courtiser Suzanne, sa femme de chambre et promise de Figaro. Lors de la fête donnée pour le mariage, Figaro surprend Suzanne donnant rendez-vous au comte. Il s’agit en fait d’un stratagème pour permettre à la comtesse de reconquérir son époux. Mais Figaro l’ignore et se sent trahi.

 


FIGARO, seul, se promenant dans l’obscurité, dit du ton le plus sombre : Ô femme ! femme ! femme ! créature faible et décevante !... nul animal créé ne peut manquer à son instinct ; le tien est-il donc de tromper ? … Après m’avoir obstinément refusé quand je l’en pressais devant sa maîtresse ; à l’instant qu’elle me donne sa parole ; au milieu même de la cérémonie… Il riait en lisant, le perfide ! et moi, comme un benêt… ! Non, Monsieur le comte, vous ne l’aurez pas… vous ne l’aurez pas… Parce que vous êtes un grand Seigneur, vous vous croyez un grand génie !... Noblesse, fortune, un rang, des places : tout cela rend si fier ! Qu’avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donnés la peine de naître, et rien de plus ; du reste, homme assez ordinaire ! Tandis que moi, morbleu ! perdu dans la foule obscure, il m’a fallu déployer plus de science et de calculs pour subsister seulement, qu’on en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes : et vous voulez jouter … On vient … c’est elle … ce n’est personne. – La nuit est noire en diable, et me voilà faisant le sot métier de mari, quoique je ne le sois qu’à moitié ! (Il s’assied sur un banc) Est-il rien de plus bizarre que ma destinée ! Fils de je ne sais pas qui, volé par des bandits, élevé dans les mœurs, je m’en dégoûte et veux courir une carrière honnête ; et partout je suis repoussé ! J’apprends la chimie, la pharmacie, la chirurgie ; et tout le crédit d’un grand seigneur peut à peine me mettre à la main une lancette vétérinaire ! [Figaro compte comment, par ses écrits il a été envoyé en prison] Las de nourrir un obscur pensionnaire, on me met un jour dans la rue ; et comme il faut dîner quoiqu’on ne soit plus en prison, je taille encore ma plume, et demande à chacun de quoi il est question : on me dit que pendant ma retraite économique il s’est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s’étend même à celles de la presse ; et que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs. […] Un grand seigneur passe à Séville ; il me reconnaît, je le marie, et pou pris d’avoir eu par mes soins une épouse, il veut intercepter la mienne ! Intrigue, orage à ce sujet. […] Forcé de parcourir la route où je suis entré sans le savoir, comme j’en sortirai sans le vouloir, je l’ai jonchée d’autant de fleurs que ma gaité me l’a permis. […] Maître ici, valet là, selon qu’il plaît à la fortune ! ambitieux par vanité, laborieux par nécessité, mais paresseux … avec délices ! orateur selon le danger, poète par délassement, musicien par occasion, amoureux par folles bouffées, j’ai tout vu, tout fait, tout usé. Puis l’illusion s’est détruite, et trop désabusé … […] Suzon ! Que tu me donnes de tourments !

 

En quoi ce texte est-il une satire de la société du XVIIIe siècle ? Que dénonce Figaro ?

Imaginez, à partir du texte un portrait physique, social et psychologique de Figaro et du comte Almaviva. 

Publié dans Quarta A

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